Idéal du Moi


L' Idéal du Moi (allemand : IdealIch) désigne les valeurs positives auxquelles aspire le sujet, il est lié au narcissisme (Freud 1914) et à la seconde topique (Freud 1920). Le Moi idéal, toujours dans la métapsychologie freudienne, désigne une instance reposant sur un idéal de toute puissance infantile basée sur la narcissisme infantile.
Modèle que l'on cherche inconsciemment à égaler. But à atteindre.
L'idéal du moi est construit par l'enfant au fur et à mesure de ses identifications avec son entourage social et au rythme de ses échecs.
Petit à petit le jeune enfant introjecte les références qu'il cherchera ensuite à atteindre.
Sigmund Freud emploie bien le terme d'Idéal du Moi, mais il ne le distingue pas véritablement du Moi. Il en fait simplement partie, le Moi n'étant pas que cela, mais cherchant effectivement à adopter des représentations conciliables avec les valeurs les plus investies.
L'idéal du moi se distingue du surmoi en ce que le surmoi est une instance purement critique, retournement de la violence contre soi-même, par peur de perdre l'amour des parents. Là où le surmoi juge pour condamner, l'Idéal du Moi, présente un modèle d'identification : cette instance décrit in fine la satisfaction éprouvée face à la représentation conforme aux représentations investies comme positives, bonnes, bien.
Cette distinction ramène l'Idéal du Moi à une partie, une des fonctions du Moi, ou encore à l'un de ses aspects : la satisfaction de l'identification quand celle-ci permet de conserver l'amour, quand l'identification se présente comme cohérente avec les autres représentations.
L'idéal du Moi se distingue nettement du Moi. Alors que l'instance moïque tient du registre imaginaire, est captation aliénante du Sujet, l'idéal du Moi amène l'identification à un registre symbolique. L'idéal du Moi rassemble des images, provenant du deuxième Autre qui incarne la Loi, proposant au Moi des identifications. L'Idéal du Moi est donc instance du discours. L'idéal du Moi est lié au stade du miroir. Le moi idéal (en allemand, ichideal) se rapporte au sujet se percevant comme idéalisé.
Sigmund Freud ne distingue pas le moi idéal ni l’idéal du moi. Le moi idéal se comprend pourtant selon une formulation freudienne. C'est Hermann Nunberg l'un des premiers qui l'a désigné sous cette appellation de "moi idéal" comme instance antérieure et plus archaïque que l'Idéal du Moi. Il est corolaire d'un moi inorganisé, uni au ça. C'est ensuite Daniel Lagache qui a opposé les couple "idéal du Moi - Moi" à celui de "Moi idéal - ça".
Freud pense la formation du moi comme s'étalant en plusieurs phases. Si le moi institue la conscience et le principe de réalité, lequel rendra possible la capacité d'admettre des défauts fondant le moi réalité, il y a dans un premier temps un moi bien plus archaïque. Le moi plaisir, s'il dénote un premier travail de différenciation entre le dedans et le dehors, s'accorde en effet certains avantages : il rejette à l'extérieur toute faute – ou plutôt tout déplaisir, toute imperfection – et se pense comme la somme de tout bien.
Le moi plaisir décrit donc la tendance infantile à se reconnaitre comme le bien, et à désigner l'extérieur comme le mal. Il y a introjection du bon et projection du mauvais.
Le moi idéal sera l'instance des identifications héroïques. Si le moi se définit déjà comme imaginaire, le moi idéal est triomphe du conte, s'exprimant par exemple dans le rêve, ou la rêverie diurne, exprimant toute la force du sujet qui se voit comme surhomme (au sens de superman, concept différent du Surhomme de Friedrich Nietzsche).
Le Moi idéal est le lieu du fantasme héroïque, lieu dans lequel le sujet se voit accomplissant maintes merveilles. L'idéal du moi contient les traits des futurs choix objectaux. L'idéal du moi se présente alors comme "celui que j'aimerais être", face au moi-idéal, "ce que j'ai été", sa majesté bébé.
Avec la résolution du conflit Oedipien, une partie de la personnalité de l'enfant va assumer les interdits du parricide et de l'inceste, ainsi que l'identification au parent du même sexe que lui. C'est le Surmoi, héritier de l'Oedipe. C'est l'intériorisation des interdits et des exigences parentales et sociales, le censeur du futur adulte. Une fois formé, le Surmoi va remplacer les parents dans la vie sociale. Il rentrera continuellement en conflit avec les pulsions, et entraînera la culpabilité.

Le Surmoi est l'instance refoulante, le support de tous les interdits et des contraintes sociales et culturelles. Son activité est partiellement inconsciente. Héritier du complexe d'Oedipe, il se constitue par intériorisation des exigences et interdits parentaux. L'enfant renonce au désir incestueux grâce à la fonction séparatrice du père, puis la découverte des règles sociales sous la pression de l'instance refoulante: le Surmoi.


C'est un modèle auquel le sujet cherche à se conformer, résultat de l'identification aux parents idéalisés. L'idéal du Moi est une instance qui accompagne le processus de socialisation, tout au long de la formation de la personnalité. C'est aussi le substitut de la toute-puissance de l'enfant (de "je peux tout" à "je voudrais tout pouvoir") pour la construction de son Moi. Le Moi se compare et se construit par rapport à un idéal, à une référence permettant au sujet de se dépasser. Cet idéal personnel se forme progressivement au cours de l'enfance par identification aux personnes proches (souvent les parents) aimées et admirées. Cette instance psychique est consécutive à l'identification Oedipienne, et relève du symbolique.

Ne pas confondre avec le "Moi idéal", qui n'est pas le substitut mais l'idéal d'une toute-puissance narcissique, avec identification à des personnages fabuleux ou prestigieux. Le Moi idéal ne propose pas de modèle accessible pour le processus de socialisation. C'est le Moi qu'on se construit dans le stade du miroir, celui qui relève de l'imaginaire.

En simplifiant on peut dire que le Moi Idéal est présent au départ, c'est le moi narcissique, le "je m'aime". Ensuite, il évolue vers l'Idéal du Moi. Au fur et à mesure que l'enfant grandit, il inclut dans le Moi Idéal les objets parentaux idéalisés, les références, les images, ... Après l'Oedipe, chaque enfant se construit un Idéal du Moi qui n'est plus personnifié par tel ou tel adulte. C'est selon cet Idéal qu'il voudrait devenir adulte de son sexe, en regard de l'Idéal qu'il se fait de l'autre sexe. (1)
L'Idéal du Moi apparaît pour Freud comme un substitut du Moi Idéal, le Moi Idéal désignant le Moi réel qui a été l'objet des premières satisfactions narcissiques. Ultérieurement, le sujet tend à retrouver ce Moi Idéal, caractéristique de l'état de toute puissance du narcissisme infantile, du temps où l'enfant était à lui-même son propre idéal. Sous l'influence des critiques parentales et du milieu extérieur, les premières satisfactions narcissiques procurées par le Moi Idéal sont progressivement abandonnées et c'est sous forme de ce nouvel Idéal du Moi que le sujet cherche à les reconquérir.

Freud voit donc dans l'Idéal du Moi une formation nettement différenciée du Moi qui permet de rendre compte notamment de la fascination amoureuse, de la dépendance à l'égard de l'hypnotiseur et de la soumission au leader, autant de cas où une personne étrangère est mise par le sujet à la place de son Idéal du Moi

Pour Lacan, le Moi Idéal est aussi une formation essentiellement narcissique trouvant son origine dans le stade du miroir et appartenant au registre de l'imaginaire.

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La formation de l’idéal du Moi

Nous avons appris que des motions pulsionnelles subissent le destin du refoulement pathogène, lorsqu’elles viennent en conflit avec les représentations culturelles et éthiques de l’individu. Par cette condition, nous n’entendons jamais que la personne a de l’existence de ces représentations une simple connaissance intellectuelle, mais toujours qu’elle les reconnaît comme faisant autorité pour elle, qu’elle se soumet aux exigences qui en découlent.

Le refoulement, avons-nous dit, provient du Moi; nous pourrions préciser: de l’estime de soi qu’a le Moi. Les mêmes impressions, expériences, impulsions, motions de désir auxquelles tel homme laisse libre cours en lui ou que du moins il élabore consciemment, sont repoussées par tel autre avec la plus grande indignation, ou sont déjà étouffées avant d’avoir pu devenir conscientes.

Mais la différence entre ces deux sujets, qui contient la condition du refoulement, peut s’exprimer facilement en des termes qui permettent de la soumettre à la théorie de la libido. Nous pouvons dire que l’un a établi en lui un idéal auquel il mesure son Moi actuel, tandis que chez l’autre une telle formation d’idéal est absente. La formation d’idéal serait du côté du Moi la condition du refoulement.

C’est à ce Moi idéal que s’adresse maintenant l’amour de soi dont jouissait dans l’enfance le Moi réel Il apparaît que le narcissisme est déplacé sur ce nouveau Moi idéal qui se trouve, comme le Moi infantile, en possession de toutes les perfections. Comme c’est chaque fois le cas dans le domaine de la libido, l’homme s’est ici montré incapable de renoncer à la satisfaction dont il a joui une fois.

Il ne veut pas se passer de la perfection narcissique de son enfance; s’il n’a pas pu la maintenir, car, pendant son développement, les réprimandes des autres l’ont troublé et son propre jugement s’est éveillé, il cherche à la regagner sous la nouvelle forme de l’idéal du Moi. Ce qu’il projette devant lui comme son idéal est le substitut du narcissisme perdu de son enfance; en ce temps-là, il était lui-même son propre idéal.

Freud examine ensuite les rapports entre la formation d’idéal et la sublimation - concepts qu’il différencie ainsi: la formation d’idéal agit en faveur du refoulement alors que la sublimation représente une issue pour l’éviter. L’idéal concerne l’objet (on «idéalise» les objets), la sublimation est un destin de la pulsion.

La tâche de veiller à la satisfaction narcissique provenant de l’idéal du Moi serait accomplie par l’instance - que nous nommons conscience morale - qui observe sans cesse le Moi actuel pour le mesurer à l’idéal. L’activité de cette instance se manifeste aussi bien dans les doléances de la paranoïa que dans l’introspection.



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L’idéal du Moi, le Moi et la foule
Si, à la lumière des descriptions, se complétant les unes les autres, que les auteurs nous ont données de la psychologie collective, on examine la vie de l’individu de nos jours, on se trouve en présence de complications faites pour décourager toute tentative de synthèse. Chaque individu fait partie de plusieurs foules, présente les identifications les plus variées, est orienté par ses attaches dans des directions multiples et a construit son idéal du Moi d’après les modèles les plus divers.
Chaque individu participe ainsi de plusieurs âmes collectives, de celles de sa race, de sa classe, de sa communauté confessionnelle, de son Etat, etc., et peut, de plus, s’élever à un certain degré d’indépendance et d’originalité.
Ces formations collectives permanentes et durables ont des effets uniformes qui s’imposent à l’observateur avec moins de force que les manifestations des foules passagères se formant et se désagrégeant rapidement, qui ont fourni à M. Le Bon les éléments de sa brillante caractéristique de l’âme collective; et c’est dans ces foules bruyantes, éphémères, superposées pour ainsi dire aux autres, qu’on observe le miracle de la disparition complète, quoique peut-être passagère, de toute particularité individuelle.
Nous avons essayé d’expliquer ce miracle, en supposant qu’il est dû à ce que l’individu renonce à son idéal du Moi en faveur de l’idéal collectif, incarné dans le chef. Ce miracle, devons-nous ajouter à titre de correction, n’est pas également grand dans tous les cas. Quelquefois le divorce entre le Moi et l’idéal du Moi n’est pas complet, les deux peuvent continuer à coexister, le Moi ayant conservé, en partie tout au moins, sa suffisance narcissique antérieure.
Le choix du chef se trouve alors facilité dans une grande mesure. Il suffit qu’il possède les propriétés typiques de ces individus à l’état de pureté et de netteté particulières et qu’il leur en impose par sa force et par sa grande liberté libidinale, pour être aussitôt désigné comme chef et revêtu d’une toute-puissance à laquelle il n’aurait peut-être jamais prétendu sans cela. Quant aux autres, c’est-à-dire à ceux dont l’idéal du Moi ne trouverait pas dans le chef une incarnation complète, ils sont entraînés « suggestivement », c’est-à-dire à la faveur de l’identification.
On voit que la contribution que nous apportons à l’explication de la structure libidinale d’une foule se réduit à la distinction entre le Moi et l’idéal du Moi et, consécutivement, à deux variétés d’attaches, l’une représentée par l’identification, l’autre par la substitution d’un objet libidinal extérieur à l’idéal du Moi.
L’hypothèse qui postule ce degré dans le Moi et qui, comme telle, constitue le premier pas dans l’analyse du Moi doit peu à peu trouver sa justification dans les domaines les plus divers de la psychologie. Dans mon travail Zur Einführung des Narzissmus, j’ai essayé de réunir les données pathologiques qui plaident en faveur de cette distinction. Mais tout autorise à espérer qu’une étude psychologique plus approfondie des psychoses fera tout particulièrement ressortir son importance.
Pensons seulement au fait qu’à partir de ce moment le Moi établit une relation entre un objet et l’idéal du Moi émané de lui-même, et il est possible que nous assistions ici à la reproduction, à l’intérieur du Moi, des actions et réactions réciproques qui, d’après ce que nous a révélé la théorie des névroses, se déroulent entre l’objet extérieur et le Moi total.

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La mélancolie : un moi maltraité par l’idéal
La transformation en manie ne constitue pas un trait indispensable du tableau morbide de la dépression mélancolique. Il y a des mélancolies simples, à accès unique, ou périodiques, qui ne subissent jamais ce sort. Mais il y a, d’autre part, des mélancolies dans lesquelles les occasions extérieures jouent un rôle étiologique évident.
Ce sont celles qui surviennent soit à la suite de la mort d’un être aimé, soit à la suite de circonstances qui ont déterminé le détachement de la libido d’un objet aimé. Comme les mélancolies spontanées, ces mélancolies psychogènes peuvent subir la transformation en manie, avec retour consécutif à la mélancolie, le cycle recommençant ainsi plusieurs fois.
La situation est donc assez obscure, d’autant que rares sont encore les formes et les cas de mélancolie qui aient été jusqu'à présent soumis à l’examen psychanalytique. Les seuls cas que nous comprenions bien actuellement sont ceux où l’objet a été abandonné, parce qu’il s’est montré indigne d’amour. Il se trouve alors, par le mécanisme de l’identification, reconstitué dans le Moi et sévèrement jugé par l’idéal du Moi. Les reproches et attaques dirigés contre l’objet se manifestent alors sous la forme de reproches qu’on s’adresse à soi-même.
Même une mélancolie de ce dernier genre peut se transformer en manie, de sorte que cette possibilité apparaît comme une particularité indépendante de tous les autres caractères du tableau morbide.
Mais je ne vois aucune difficulté à introduire dans l’explication des deux variétés de mélancolie, de la spontanée et de la psychogène, le facteur que nous avons défini comme étant la révolte périodique du Moi contre l’idéal du Moi.
En ce qui concerne les mélancolies spontanées, on peut admettre que l’idéal manifeste une tendance à la sévérité particulière, ce qui a pour conséquence automatique sa suppression momentanée. Dans les mélancolies psychogènes, la révolte du Moi serait provoquée par les rigueurs que le Moi subit de la part de l’idéal, dans le cas de son identification avec un objet réprouvé et repoussé.

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